Paul-Henri Fillion : l’homme qui insufflait l’envie d’entreprendre

Donateur d’exception et diplômé en génie civil de l’Université Laval, Paul-Henri Fillion s’engage envers la relève afin d’encourager l’entrepreneuriat scientifique. Après une fructueuse carrière en affaires, il souhaite redonner aux générations actuelles et futures en sciences et génie. Portrait d’un homme dont le parcours auréolé de succès se traduit aujourd’hui par un soutien aux jeunes rêvant d’entreprendre.

 

Une jeunesse marquée par la philanthropie

Paul-Henri Fillion est né en 1930, à Saint-Laurent, sur l’île d’Orléans. Élevé dans une famille peu fortunée, il fait face aux difficultés mettant en péril la poursuite de ses études après le primaire. « À l’époque, dans mon milieu, les études se terminaient en 7e année, explique-t-il. Mais ma mère voyait plus loin. Elle voulait que je me réalise pleinement. » Souhait exaucé : grâce à des bourses d’études obtenues par ses excellents résultats scolaires, M. Fillion peut compléter son cours classique au Séminaire de Québec. « Des donateurs ont cru en moi et en mes capacités. Les bourses qu’ils m’ont octroyées m’ont permis d’obtenir un diplôme et d’arriver à l’Université Laval ». Cette solidarité pavera la voie de sa future carrière et d’une grande réussite.

M. Fillion entame ses études supérieures en génie civil et obtient son diplôme d’ingénieur en 1954. Avec cette étape cruciale qui s’achève, une autre pointe à l’horizon. Assistant à une conférence de l’Université sur les travaux de construction en Europe, M. Fillion réalise qu’il n’existe aucun échange culturel sur le plan scientifique entre le Québec et la France. « J’ai présenté ma vision au conférencier et grâce à son influence, j’ai reçu non pas une, mais deux bourses pour parfaire mes études à l’École Nationale des Ponts et Chaussées de Paris », révèle-t-il. Le voilà premier ingénieur civil du Québec à étudier dans ce domaine en France : on décèle déjà l’esprit innovateur et visionnaire qui guidera le reste de sa vie.

L’appel des affaires

De retour à Québec en novembre 1955, Paul-Henri Fillion côtoie à nouveau les bancs de l’Université Laval et obtient une maîtrise en sciences appliquées en 1956. Ses diplômes en poche et son expérience à l’étranger impressionnent le doyen de la Faculté des sciences, qui lui demande de bâtir un cours encore jamais enseigné à Laval : le design d’aéroport. M. Fillion enseignera cette spécialité aux étudiants de 5e année en génie civil jusqu’en 1964. À la même période et 10 années durant, il œuvre comme ingénieur-conseil en structures et fondations.

Tous ces projets le tiennent occupé, mais M. Fillion se refuse à entrer dans les rangs. Il décide de devenir manufacturier, mise sur l’aspect technologique et vise le marché nord-américain, voire mondial! Son aspiration en tête, M. Fillion fonde en 1966 la firme Hoplab, contraction des mots hôpital et laboratoire. « À l’époque, c’était mieux vu pour un nom en affaires d’avoir une sonorité anglophone! », précise-t-il sourire en coin. Son entreprise manufacture des appareils pour le nettoyage et la décontamination d’objets comme les instruments chirurgicaux, la verrerie de laboratoire et les cages d’animaux utilisés en recherche. Paul-Henri Fillion développe une gamme d’appareils et en vend partout au Québec. Mais il voit plus grand et veut exporter ses produits en Ontario. Là-bas, il se heurte à une embûche : les institutions, voyant la fabrication québécoise des laveuses, exigent d’y voir plutôt un signe Made in Canada. « Je n’allais quand même pas les laisser me dicter quoi faire, alors j’ai laissé l’Ontario derrière et j’ai filé tout droit vers l’Ouest! », raconte le regard facétieux M. Fillion. « Les Ontariens m’ont finalement rappelé quand ils ont réalisé que toutes les autres provinces achetaient mes appareils! »

Les États-Unis ne tardent pas à apparaître sur le radar de ses ambitions, malgré plusieurs nouveaux obstacles sur son chemin. Une rencontre fortuite, lors d’une exposition au Texas, changera tout et propulsera son avenir. Il y fait la connaissance du président de la société Amsco, qui fabrique le même type d’appareils de nettoyage. « Je l’ai poussé à venir prendre un café avec moi, j’avais conscience que c’était l’opportunité de ma vie, ajoute M. Fillion. Je lui ai dit, avec toute ma naïveté et mon anglais approximatif, que mes produits étaient mieux conçus que les siens, dont sa clientèle se plaignait. » Par la force de sa confiance et de sa vision, M. Fillion le convainc d’acheter ses laveuses et de les vendre. Partie de rien et appréciée pour la qualité et la performance de ses appareils, Hoplab devient le plus important manufacturier dans sa ligne d’activités en Amérique du Nord et le deuxième au monde. L’entreprise de M. Fillion gagne en notoriété parmi la société québécoise comme leader de l’innovation et de l’exportation. Aujourd’hui, Hoplab, devenue Stéris Canada, est toujours située à Québec et emploie 350 personnes.

S’engager envers l’entrepreneuriat local

Malgré son succès à l’époque, réussir en affaires n’est pas suffisant pour Paul-Henri Fillion. En plus de siéger à plusieurs conseils d’administration au fil des ans, il veut partager ses expériences et ses apprentissages pour créer un véritable réseau d’entraide parmi les entrepreneurs de la région de Québec. C’est ainsi qu’il participera activement à la fondation du Groupement des chefs d’entreprise, premier réseau du genre au Québec.
« Cette initiative d’entraide visait à briser leur isolement et à partager les conseils et les contacts en affaires, précise M. Fillion. Le groupement, encore actif aujourd’hui, fut très important pour l’essor du Québec inc. ». 

Par sa réussite internationale comme par son implication dans le milieu des affaires local, M. Fillion s’est érigé en grand bâtisseur du tissu entrepreneurial québécois.

Des bourses pour soutenir la relève

Aujourd’hui retraité, M. Fillion souhaite redonner et soutenir l’esprit entrepreneurial dans le milieu scientifique. Il a pour ce faire créé le Fonds Paul-Henri Fillion pour l’Entrepreneuriat, afin de soutenir financièrement les étudiantes-entrepreneures et les étudiants-entrepreneurs de la Faculté des sciences et de génie (FSG) à l’Université Laval. Ce geste philanthropique d’exception, qui s’inscrit dans le cadre du programme de bourses ENVOL EGGENIUS de la FSG, permet aux boursières et aux boursiers de poursuivre activement leur projet d’entreprise tout en complétant leur diplôme. « À une certaine époque, les entrepreneurs qui réussissaient étaient les patenteux dont les patentes devenaient un succès, à l’instar des gens comme Joseph-Armand Bombardier, constate M. Fillion. Mais aujourd’hui, l’instruction occupe une place primordiale dans l’entrepreneuriat. Je contribue à ma façon pour encourager cet esprit d’entreprise à l’Université et donner les moyens aux étudiants de réaliser leur projet, comme j’ai moi-même été soutenu à leur âge. »

Puisque nombre d’étudiantes et étudiants à la FSG sont animés par la flamme de démarrer leur entreprise, ces bourses arrivent à point nommé. Si M. Fillion fait ce don majeur, à hauteur d’un million de dollars, c’est aussi parce qu’il saisit tout l’impact de l’entrepreneuriat pour le Québec.

« Encourager les projets de la relève aidera à créer des emplois, à implanter de nouvelles entreprises qui auront des retombées économiques majeures sur la société ». D’ailleurs, au-delà de cette aide financière, les boursières et boursiers bénéficient de la présence d’Entrepreneuriat Laval, qui leur offre un accompagnement personnalisé, du mentorat, des services-conseils, des ateliers et des programmes de développement d’entreprise.

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M. Fillion en compagnie de sa conjointe, Maxellende Lemieux, lors d'un événement de reconnaissance, le 10 décembre 2021

 

Un exemple exceptionnel pour le dynamisme économique

L’engagement de M. Fillion avec l’Université Laval est profondément humain et ne se limite pas aux bourses. Il espère que son parcours pourra inspirer les jeunes entrepreneurs dans la réalisation de leurs rêves, car il connaît les embûches qui les guettent. « Souvent, un entrepreneur est très seul dans son projet et dans sa vision, seul avec ses doutes, ses difficultés, confie-t-il. C’est donc important d’entendre des histoires de succès pour persévérer. » À cet égard, M. Fillion n’hésite pas à prodiguer des conseils aux bénéficiaires des bourses, tantôt les invitant à joindre le réseau d’entraide qu’il a aidé à créer, tantôt leur exposant son analyse chevronnée sur leur projet. « Je veux contribuer au-delà de l’argent et donner du sens à mon geste. Cela prend du temps et des discussions. » M. Fillion offre ainsi plus qu’un don; il laisse un legs précieux à la jeunesse pour aider à bâtir l’avenir entrepreneurial au Québec.

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